Réflexions sur l’Art

Je ne ferai pas ici une longue présentation pour expliquer ma démarche artistique. C’est d’ailleurs souvent pompeux et un peu prétentieux, voila pourquoi beaucoup d’artistes préfèrent laisser parler un critique d’art à leur place (c’est mieux quand un type sérieux parle de vous à la troisième personne). Mais ce ne sera pas le cas pour moi car d’une part, je n’en connais aucun, et d’autre part, je veux vous épargner cette lecture fastidieuse. J’esquiverai donc en parlant d’art et vous préciserai à la fin de ce billet comment je conçois la création.

Au fait, l’art qu’est-ce que c’est? 

Un type dont j’ai oublié le nom a dit un jour : « Pour le profane, l’art se cache derrière une montagne, pour l’initié, il se dissimule sous un brin d’herbe ». L’art n’est peut être donc pas aussi compliqué à saisir qu’on le dit, il est peut-être même tellement évident qu’il est partout. En cela, on doit beaucoup à Marcel Duchamp qui l’a définitivement démocratisé avec ses « Ready-made » (sortes d’objets manufacturés que s’approprie l’artiste en les signant). En fait, la signification du mot artiste n’a-t-elle pas disparue avec son invention? Dans un monde où tout le monde est devenu artiste, ne vaut-il pas mieux être un « non-artiste » pour se faire remarquer? Or, on peut tourner la question dans tous les sens, on constate que si tout le monde est artiste, seul celui qui a du charisme où qui assure en marketing peut se faire connaître, à moins d’avoir la chance d’entrer dans les bonnes grâces d’un richissime collectionneur (comme ce fut le cas de Chaïm Soutine avec le mécène Albert Barnes). Mais c’était il y presque cent ans, et de nos jours, ces derniers sont devenus frileux devant le nombre pléthorique de candidats qui se bousculent à leur guichet pour se faire financer leurs installations, d’autant qu’ils préfèrent fréquenter la FIAC et les galeries renommées des grandes métropoles qu’un obscur Salon d’été à Pétaouchnok.

Lors d’une visite dans un centre d’art contemporain, vous avez sûrement déjà été confronté à la fameuse réflexion d’un jeune mis de corvée d’expo par ses parents qui lâche devant une toile de Jean-Michel Basquiat ou de Cy Twonbli : « C’est nul, je pourrais le faire en mieux! » ; réflexion a laquelle ces derniers ont répondu d’un ton doctoral : « L’art n’a pas à être beau, c’est la démarche de l’artiste qui compte ». (Pour la petits histoire, j’ai entendu un jour de la bouche d’un galeriste que les faux Basquiat se reconnaissent facilement, pour la bonne et simple raison qu’il sont beaucoup mieux exécutés que les originaux…) Et le gamin de renchérir : « Sa démarche, c’est de se foutre de nous? » En général, l’échange s’arrête là, et les parents s’éloignent de l’œuvre d’art de peur de se faire lyncher par un gardien du temple de l’artistiquement correct. Alors, quelle est la différence entre un peintre du dimanche et un maître certifié « Toile d’or » par artprice.com? Enfonçons d’ailleurs le clou avec la question fort à propos que nous pose Marcel Duchamp : « Peut-on faire des œuvres qui ne soient pas «d’art»? »

Certains critiques d’art diront oui, c’est même grâce à cela qu’on différencie un maître (Basquiat par exemple) d’un barbouilleur. D’autre diront non, puisque certains peintres du dimanche sont devenus des artistes reconnus (tel Gaston Chaissac qui revendiquait l’art brut comme un art rustique moderne).

Dans sa lettre à Pierre Carbonel (6 juillet 1966), Dubuffet définit l’artiste comme celui qui montre ses créations, par opposition à l’autodidacte qui les fait pour lui et son proche entourage :

« Le silence et le secret restent les fondements inhérents à la véritable production artistique ; le créateur autodidacte œuvre pour son propre usage, sans aspirer à la communication ni à la diffusion de ses travaux. Vous ne pouvez pas être un créateur et être salué par le public de ce titre. […] Il faut choisir entre faire de l’art et être tenu pour un artiste. L’un exclut l’autre. »

Mais de nombreux autodidactes sont devenus de grands artistes (tels Duchamp, Basquiat ou Soulages parmi tant d’autres).

Bref, vu que l’art est tout sauf ce qu’il n’est pas, et réciproquement, je ne me hasarderais pas à définir ici ce qu’est un artiste certifié comme tel par le monde de l’art. Je me contenterai de penser que l’artiste correspond à la définition qu’en fait Wikipedia : « individu faisant (une) œuvre, cultivant ou maîtrisant un art, un savoir, une technique, et dont on remarque entre autres la créativité, la poésie, l’originalité de sa production, de ses actes, de ses gestes. Ses œuvres sont source d’émotions, de sentiments, de réflexion, de spiritualité ou de transcendances », ou bien peut-être à son opposé, qui sait?

Conclusion de ce billet :

« On peut être artiste sans être rien de particulier ». On dira que je me retrouve bien dans cette puissante réflexion du grand Marcel. Et a ceux qui me disent : « Vous créez peu en ce moment », je répondrai comme lui : « Faut-il réagir contre la paresse des voies ferrées entre deux passages de trains? »

Un peu d’humour :